Le coin des poétes

Pour ne pas oublier

Le bal

MOURIR UN PEU - Thérèse

 

Les mots

A quoi servent les mots ? Avant tout à parler.

A quoi sert de parler ? Surtout à se comprendre

Alors, pourquoi les mots, si jolis en français

Doivent-ils changer ? … Tant d'idiomes à défendre ! …

Las ! Comment voulez-vous que ces traits de liaison.

Ensevelis, brisés sous la tour de Babel.

Puissent aider le partage, animer les passions.

Sans cacher en poignard quelque pointue voyelle ?

Les mots blancs, les mots noirs, les mots rouges, les jaunes.

Et tous ces mots d'ethnies qui se sont mélangées...

Les mots colonisés,les étranges consonnes...

Les mots Front National... les mots persécutés...

Les mots en ribambelle, et les mots qui bégayent ;

Les mots en farandole et leurs accents chantants ;

Les mots venus d'ailleurs, les mots qui émerveillent ;

Et les mots d'outre-tombe qu'apprivoise Satan.

Mots tremblants de l'aïeul, du bébé qui babille...

Mots sages de l'ancien ; tendres mots de la mère...

Mots secret des alcôves ; ordres des militaires...

Mots mouillés des ruptures, des amours en guenille...

A quoi servent les mots ? Avant tout à parler.

A quoi sert de parler ? Surtout à se comprendre.

Et si nous comprenons qu'il faut d'abord s'aimer,

Ce n'est que du bonheur qu'il faudrait en attendre.

 

Béatriz

 

Mon ami le vent

Bonjour mon cher ami le vent !

D'où venez-vous, Où étiez-vous ?

Délicate, la feuille frissonne.

Tout entier, s'éveille l'arbre si beau !

Le parfum de la rose et du sureau,

Si finement répandu embaume.

 

Tout doux ! Mon fol ami le vent ! 

Que de courroux ! Que faites-vous ? 

Le papillon aux ailes bleues est mort... 

Un tout petit avec étonnement, 

Ouvre ses yeux tout grand, pleins de tourment. 

L'oisillon du doux nid se trouve hors. 

 

Alors, mon bel ami le vent ? 

Ne voyez-vous ? Mais taisez-vous ! 

Du ruisselet s'est tu le murmure. 

Un homme, dos en front en sueur, 

Attends des nuages la pluie ta sœur, 

Et toi, sous la chaleur, tu tortures.

 

 

Bonsoir mon doux ami le vent ! 

C'est la nuit, sous les étoiles scintillantes, 

En plaine, sur les maisons assoupies, 

Sur le fleuve ou où sourd tant de vies, 

Tombe la rosée rafraîchissante. 

 

Marie-Thérèse Despert     (Marie-thérèse a 86 ans)

 

Une odeur de la mer

Je porte au fond de moi une odeur de la mer.

Inondant ma narine comme un doux filtre amer,

Une odeur du grand large accrochée au rivage,

Un fort parfum d'embruns répandu sur le plage.

 

Je porte au fond de moi mon odeur de la plage,

Cette brise marine au bord d'un coquillage.

Dans le creux d'un rocher, j'ai caché mon poème,

Et tous les grains de sable ont l'odeur d'un je t'aime.

 

Je garde au fond de moicomme un secret magique

Qui berce ma mémoire aux mots chorégraphiques,

Des images d'enfants prenant le sable chaud,

Dans le creux de leurs doigts,dans leurs seaux, dans leur peau.

 

Je garde au fond de moi cette odeur de la mer.

 

Les enfants à la plage construisent des châteaux,

Avec de hautes tours et de grands chapiteaux;

Avec des ponts-levis, avec des forteresses,

Batis dans cette ardeur unique à la jeunesse.

 

Je porte au fond de moi cette odeur de la plage,

Ces vagues, ces remous, cette odeur du grand large,

Et toute cette écume éclaboussant la grève

Vient caresser mes pieds, exauçant tous mes rêves.

 

Nelly Chamard